mercredi 7 novembre 2007

BAKERLOO

BAKERLOO

L’histoire du Rock est riche en petits groupes oubliés de tous genres. Nombreux sont ceux qui sont devenus légendaires avec la postérité, des années après. C’est ce que l’on appelle des groupes cultes.
Bakerloo fait parti de cette catégorie. Power-trio fondé en 1967 dans le Staffordshire, dans la ville de The Tamworth, le groupe s’appelle d’abord Bakerloo Blues Line. Composé de Terry Poole à la basse et au chant, de Dave « Clem » Clempson à la guitare, et de Keith Baker à la batterie, le trio est d’abord un des nombreux ersatz de Cream sévissant à l’époque.
Ils tournent alors dans les clubs de jazz et de blues, avant de se lancer dans une tournée nationale en compagnie d’un quatuor du nom de Earth en 1968. Le fameux quatuor deviendra Black Sabbath en 1969, et c’est sans doute à leur contact que Bakerloo épaissit sa musique.
Signé début 1969 par Harvest, le groupe se produit au Marquee de Londres en compagnie de… Led Zeppelin. Vous me suivez ?
N’allez pas croire que Bakerloo est une copie de plus du hard-blues à la Spooky Tooth, Free, Led Zeppelin. Erreur fatale.
En fait, Poole et Baker sont des musiciens issus de la scène jazz-blues, ce qui ancre leur répertoire dans le son noir-américain des années 50. Il suffit d’écouter la fantastique reprise de Bring It On Home de Willie Dixon : sobre, roots, l’harmonica se ballade sur la mélodie, pendant que Clempson appuie un boogie rugueux à la John Lee Hooker, survolé d’une slide fluide.
En fait, le heavy-blues de Bakerloo est gras, épais, mais toujours mélodique. A ce titre, Clempson est un musicien incroyablement sous-estimé : il arrive à produire un son chaud et lourd, tout en conservant suffisamment d’espace pour faire chanter les accords et les notes. Un peu comme un croisement de John Lee Hooker ou Hubert Sumlin pour le son, et d’Albert King pour les notes chantantes, et les bends magiques. Il faut écouter l’intro de Last Blues, pleine d’écho et de réverb, avant d’éclater dans une tornade de boogie écorché, survolé d’un solo tout simplement miraculeux. Je dois avouer classer Clempson au-dessus d’un Clapton période Bluesbreakers, largement.
On pourra trouver ce disque mal foutu, comme une sorte de démonstration. Ainsi , sur Drivin’ Bachwards, le groupe reprend en version jazz-rock un thème de … Bach. De même, le titre Gang Bang est le prétexte à un solo de batterie de Baker. Mais tout cela est tellement bien joué, pétri de feeling et d’âme, que l’on ne peut que se prêter au jeu.
Mais la vraie qualité de Bakerloo, c’est de jouer un heavy-blues urbain, fantomatique. Ainsi, Last Blues est accompagné de bruit de vent hurlant de château hanté.
Mais quand vient Son Of Moonshine…. Comment dire …. Tout démarre sur un riff gras, épais, une sorte de solo lointain de guitare faisant écho entre les baffles. Puis le son monte, et le riff boogie éclate. Clempson décoche un mélange riff-solo ravageur. Poole chante d’une voix fragile et malade à sa ginger woman qu’elle doit fuir vite avant que… avant que l’enfer ne tombe sur elle !
Clem se lance alors d’un un solo hallucinant, les changement de rythme se succèdent avec une précision effarante, et la guitare chante hurle, hullule, aboie, gorgée de feedback et wah-wah, faisant monter la tension, avant de retomber, puis reprendre en un riff méchant. Ce titre de quinze minutes, absolument magique,sidérant, mérite à lui seul l’achat du disque.
Le trio se séparera fin 1969 lorsque Clempson rejoindra Colosseum, puis Humble Pie. Poole et Baker formeront l’extraordinaire May Blitz.
Il reste ce disque, séminal, gorgé de plaisir de jouer et de blues. Tout simplement.
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