mercredi 21 janvier 2009

DEEP PURPLE 1984

"La musique de « Perfect Strangers » est excellente, et a bien vieilli, contrairement à de nombreuses productions 80s. "
DEEP PURPLE « Perfect Strangers » 1984

L’exercice de la reformation est très en vogue en ce moment. Il semble q’une grande vague de nostalgie ait envahi le cœur des amateurs de rock. A moins que ce soit les musiciens des années 70, qui, la soixantaine approchant ou franchie, aient décidé de faire un petit tour d’honneur avant que le temps les ait définitivement rattrapé.
Bien sûr, on crie à l’événement, même si la moitié du groupe est mort (circa les Who ou Rose Tattoo), parce que le rock n’a jamais été aussi bon qu’à cette époque-là, et parce que même vieilli et en effectif réduit, les musiciens des 70s ont toujours cette incroyable flamme en eux. Cela n’empêche bien sûr pas les naufrages, surtout quand il s’agit de rentrer en studio.
Encore une fois, Deep Purple fut précurseur dans le genre, et ce dés 1984. Au cours des années 80, une première vague de reformations eut lieu, souvent pitoyable, car les groupes n’étaient pas encore légendaires et les musiciens fatigués, ils étaient juste has-been. La reformation de Deep Purple fut pourtant longtemps espérée, et ce depuis la disparition officielle du groupe en juillet 1976.
Individuellement, les musiciens restèrent sur le devant de l’affiche : Ritchie Blackmore cartonnait avec son Rainbow, rejoint par Roger Glover dés 1979. Ian Gillan fonda son propre groupe, Gillan, qui régna en Grande-Bretagne, avant de rejoindre Black Sabbath en 1983. Ian Paice et Jon Lord se retrouvèrent dans le groupe d’un autre ancien Deep Purple, le Whitesnake de David Coverdale, qui lui aussi, s’imposait dans les charts britanniques.
Bref, les garçons n’avaient guère de soucis à se faire, si ce n’est l’incroyable pression constante des fans. Pourtant, un événement déclencha tout. Un soir de réveillon du premier de l’an 1981,alors que Ian Gillan reconduit ses amis à la porte d’entrée, il aperçoit une voiture tournant au-dehors, et une grande silhouette noire devant le petit portail d’entrée. Gillan reconnaît rapidement le chapeau haut-de-forme d’un illustre ennemi : Ritchie Blackmore. Les deux hommes se sont en effet violemment affrontés lors du split du Mark II de Deep Purple, la célèbre formation qui accoucha de « In Rock » et de « Machine Head ». Gillan fut poussé vers la sortie par un Blackmore devenu égocentrique et omnipotent. Depuis, les deux musiciens ne se sont plus adressés la parole.
Et ce soir, Ritchie est devant la porte. Gillan le salut et l’invite à entrer. Blackmore fait un signe à son chauffeur : tout va bien, il n’aura pas à s’enfuir en courant. Les deux hommes vont passer le reste de la nuit à discuter du bon vieux temps. Mais le guitariste a une proposition à faire à Gillan : Graham Bonnet, l’actuel chanteur de Rainbow, gonfle l’homme en noir. Il veut que Ian devienne le nouveau frontman de Rainbow. Celui-ci refuse, mais les retrouvailles sont lancées. Blackmore viendra même jouer « Smoke On The Water » en rappel d’un concert de Gillan, le groupe, au Rainbow Theater (private joke ?) de Londres.
Toujours est-il qu’il faudra attendre avril 1984 pour que le Mark II, le line-up dit classique, se retrouve enfin. Les cinq hommes sont un peu mal à l’aise après tout ce temps, mais les esprits sont apaisés. Ils ont tous quarante balais, et une carrière commune et solo hors du commun. Alors lorsque les cinq se remettent à composer, les chansons viennent facilement, et la magie opère à nouveau. Comme cinq vieux briscards, ils retrouvent l’envie de s’amuser. Il faut dire qu’ils se sentent un peu cons : les premières répétitions sur les vieux titres sont catastrophiques. Aucun des cinq ne se souvient des riffs de « Highway Star » ou de « Space Truckin’ ». Alors le groupe envoie un roadie acheter les albums de Deep Purple, afin que les musiciens puissent réapprendre leurs propres titres !
Malgré la New-Wave et le Punk, Deep Purple reste le même. Gillan, Blckmore, Lord, Paice et Glover semblent se ficher éperdument du temps qui passe, et Deep Purple joue donc son hard-rock lourd et classieux comme avant. Sauf que les musiciens ont vieilli, et leurs expériences solos ont permis à l’écriture d’évoluer. Ce qui fait que le Deep Purple cru 1984 a évolué aussi.
La musique de « Perfect Strangers » est excellente, et a bien vieilli, contrairement à de nombreuses productions 80s. Certains titres sont d’ailleurs devenus des classiques, à commencer par « Knockin’g At Your Back Door » et « Perfect Strangers ». Le chant de Gillan a un grain un peu rauque pas désagréable, et la guitare de Blackmore a gagné en technique et en subtilité. La rythmique de Paice et Glover se fait plus discrète et efficace. Lord lui, tente de mettre un peu de synthé, mais il est surtout là pour apporter une couleur classique à l’ensemble.
Il faut redécouvrir le lyrisme somptueux de « Perfect Strangers » et sa mélodie un peu orientale. Il faut s’époumoner sur les refrains irrésistibles de « Knocking At Your Back Door » ou « Meanstreak ». Il faut enfin mettre un genou à terre et jouer de la hair-guitar sur les soli de Blackmore, incandescents, et largement plus inspirés que sur les derniers Rainbow.
Ce disque fut un succès commercial retentissant, tout comme la tournée mondiale qui suivit, et qui s’étendit jusqu’à Knebworth en juin 1985, sous la flotte.
La suite sera malheureusement le pain quotidien des grands groupes qui se reforment. Deep Purple explosa déjà à cause des egos tous démesurés de ses musiciens. Les personnalités s’exprimèrent à nouveau lors de la tournée mondiale de « House Of Blue Light » en 1987, ce qui conduisit au départ de Gillan en 1989. Il faut dire que le disque, le second de cette reformation, est largement moins bon que « Perfect Strangers ». Une fois de plus, l’état de grâce du Mark II ne dura que deux petites années.
Deep Purple connut de nombreux soubresauts plus ou moins glorieux, avant le départ de Blackmore définitif en 1993 qui permit à Purple de respirer à nouveau musicalement. Et à la réécoute, ce disque fait parti des grands classiques de Deep Purple, et en fait aussi un exemple à suivre en matière de reformation réussie.
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