mardi 3 mars 2009

RABBIT

"Car ici point de dandysme ou d’ambiguité trouble. Rabbit n’est qu’à l’image de son époque."

RABBIT « Rabbit » 1975

« Appelé Dave Evans un chanteur est un peu trop poli ». Cette petite douceur du verbe provient de la bouche lippue de M. Angus Young, lead-guitariste du plus grand groupe de hard-rock australien du monde, j’ai nommé AC/DC.
Mais que peut bien avoir Angus le diablotin pour en vouloir autant à leur premier chanteur, celui qui figura sur leur premier simple en 1974 ? Difficile à dire, et le secret restera confiné dans les draps pourris du petit tour-bus où étaient entassés les musiciens d’AC/DC durant ces années de vaches maigres que sont les débuts d’un groupe de rock’n’roll. Toujours est-il que Dave Evans ne voue pas semblable désagrément auprès de son ancien groupe.
Peut-être est-ce parce que ce mince lien avec cette institution du hard-rock lui permet difficilement d’échapper à l’anonymat total.
Toujours est-il que Dave Evans vit encore dans l’ombre du géant. Mais pour être très franc, je dois vous avouer que durant l’année 1975, AC/DC et Dave Evans furent au coude à coude. Franchement.
En effet, suite à son éviction d’AC/DC pour attitude trop glam pour être rock’n’roll, Evans se retrouve à la rue. Il remplace alors un certain Greg Douglas au sein d’un groupe du nom de Rabbit. Ce groupe australien est formé en 1973 par l’une des meilleures gâchettes guitaristiques australes, Mark Tinson. Celui-ci s’adjoint une section rythmique redoutable du nom de Jim Porteous à la basse et de Phil Screen à la batterie.
Tournant d’abord en trio, le groupe embauche un chanteur du nom de Greg Douglas, mais celui-ci manque de charisme. C’est à cette époque que la vidéo de « Can I Sit Next To You Girl » d’AC/DC tourne sur les télévisions australiennes.
Si les frères Young se posent des questions, Tinson et Porteus le trouvent impressionnant. Aussi, lorsque Evans se voit débarquer, il est aussitôt embaucher, non sans avoir passé une audition de rigueur. Rabbit est né.
Vous me direz, oui, mais on s’en fout. Certes, mais vous faites erreur. Car Rabbit est l’un des meilleurs groupes de hard-rock australien, rien de moins. Il est d ebon ton de ricaner sur l’attitude glam de Evans, de hocher du chef sur les propos bibliques d’Angus Young, mais voilà, l’écolier est de mauvaise foi.
Je n’ai rien à dire sur l’attitude glam, car Rabbit joua le rôle à fond, mais il ne fut pas le seul à l’époque, si l’on regarde Slade, Sweet ou T-Rex On peut donc gloser sur les accoutrements moulants et lamés, mais cela ne peut en aucun cas couvrir les formidables qualités de ce groupe.
Car, tenez-vous bien, le premier album de Rabbit est un disque formidable, au même titre que le premier Cold Chisel et le premier Rose Tattoo. La place est à la défense.

Dave Evans est certes beau gars, et il sut se fondre dans la mode de l’époque, c’est-à-dire le glam-rock. Oui, Evans n’a pas le gosier râpeux de Bon Scott, chanteur étourdissant qui transforma AC/DC en machine à brûler les planches.
Mais voilà, doté du groupe Rabbit, Evans est charismatique, et offre, un hard-rock’n’roll certes glam, mais largement plus lourd et brutal que ses confrères anglais. En effet, Rabbit est australien. Et cela se sent. Le son est boogie, rock’n’roll, heavy, sans concession. Seules les franfreluches, les plat-form boots et les attitudes machistes traduisent ce penchant après tout pas plus grotesque que celui de David Bowie et Lou Reed.
Car ici point de dandysme ou d’ambiguité trouble. Rabbit n’est qu’à l’image de son époque. Pourtant, sa musique est elle en avance sur le hard-rock australien à venir. On peut déjà y déceler les prémices des premiers albums des Angels.
Une chose est sûre, c’est que Rabbit est un redoutable groupe de Hard-Rock’N’Roll. Et vous savez quoi ? Presque meilleur qu’AC/DC à l’époque. Car si le quintet des frères Young est déjà une puissante machine à boogie, il lui manque la hargne. Au plus est-il un honnête quintet de blues, de pub-rock local. Certes, cela sent la sueur et la rage de vaincre, mais voilà, « High Voltage » n’a pas encore ce pureté du riff Hard-Rock, ce son serré de guitare, ultra-électrique qu’a déjà ici… Rabbit.
Il faut entendre « Dinosaur », « Marvel Man » , ou « Rock’N’Roll », ces riffs vengeurs et vicieux. Il faut avoir ouï ces mélodies qui coulent de source, ces refrains impeccables qui vous collent aux oreilles, ceux de « Magic », ou de « Crying Her Eyes Out ». Il faut avoir taper du pied sur ce disque magique pour comprendre que si les frères Young et Dave Evans n’avaient peut-être que peu de points communs au niveau de l’image et de la personnalité, Evans leur dama le pion avec ce disque.
Et que l’Histoire, une fois de plus injuste, l’a oublié. En attendant, Rabbit connaîtra un bon succès dans son Australie natale. Mais les accoutrements glam eurent raison du groupe, la mode étant désormais aux jeans déchirés, et aux sales gosses. Alors là, Dave Evans le flamboyant disparut, et AC/DC, Rose Tattoo et Cold Chisel gagnèrent.

tous droits réservés

2 commentaires:

Anonyme a dit…

merci chaque fois de nous offrir des focus sur des groupes oubliés ou de donner ton avis sur des formations cultes!
Continue, je suis fan de ce que tu fais!
Iro22
www.destination-rock.com

Julien Deléglise a dit…

Merci à toi Iro22 pour ton commentaire chaleureux. Il est important que ces groupes ne restent pas dans l'oubli,et que l'histoire du Rock ne se contente pas des mêmes 100 disques.